Déclin ou décadence ? Mais les deux, hélas !

Les coupeurs de concepts en quatre, dignes héritiers des théologiens qui disputaient du sexe des Anges dans Constantinople assiégée par les Turcs, distinguent le déclin et la décadence, pour tenter d’ailleurs de les nier tous les deux. La distinction est pourtant claire : le déclin d’un pays ou d’une civilisation se mesure par rapport à l’évolution des autres, la décadence est un processus interne qui désigne l’effondrement des valeurs sur lesquelles s’appuyait une société. Le premier est objectif, matériel en quelque sorte puisqu’il correspond à la puissance économique et militaire, et au rayonnement international qu’elle conférait à un Etat. La seconde est plus subjective, spirituelle et morale. Elle sera perçue par les uns comme un heureux moment de libération des moeurs tandis que pour d’autres plus clairvoyants sur ses conséquences, elle apparaîtra comme un amollissement annonciateur de la fin d’une situation historique. Le déclin est un affaiblissement relatif qui peut être ralenti, voire inversé. La décadence est une consomption inexorable qui atteint les forces morales qui pourraient tenter d’enrayer le déclin.

La métaphore médicale est facile par les temps qui courent. Le déclin est une maladie qui se soigne, la décadence, un mal sans rémission. De quoi la France souffre-t-elle ? Mais des deux ! Non seulement, elle recule dans de nombreux domaines, et se fait dépasser, mais elle entretient en elle les germes qui anéantissent ses capacités de résistance et de résilience. Au XVIIe siècle, elle était la première puissance européenne, et de loin. Au XVIIIe, toute l’Europe l’imitait et la diplomatie européenne parlait français. Avec Napoléon, elle dominait l’Europe et ses frontières englobaient une partie de l’Allemagne et de l’Italie. Au XXe siècle, elle faisait partie des quelques nations qui se partageaient le monde, derrière l’Angleterre, certes après la démesure napoléonienne, mais avant l’Allemagne. C’est d’ailleurs l’Empire qui permit à la France de continuer à exister malgré le désastre de 1940. Après avoir libéré cet Empire et s’être délivré des guerres coloniales avec de Gaulle, la France demeurait le poids lourd de l’Europe occidentale, politiquement plus forte que l’Allemagne, et économiquement pas encore distancée. Elle bénéficiait d’une autonomie et d’une aura diplomatique qui lui conférait un rôle de première importance sur la planète.

Le déclin s’est depuis précisé en arrachant le voile des illusions. La France de l’Institut Pasteur n’est pas présente dans la course aux vaccins. Mais elle s’était rendu compte auparavant qu’elle ne pouvait plus fabriquer de respirateurs et même de masques. La France est devenue un nain industriel face aux géants que sont la Chine dans le monde et l’Allemagne en Europe. Les données économiques de notre pays sont toutes dans le rouge avec une dette record en temps de Covid, mais qui jouxtait déjà les 100% du PIB auparavant, avec un déficit budgétaire depuis 45 ans, un déficit commercial en augmentation constante, une recherche deux fois moins importante que nos voisins allemands, et une formation dont les performances sont en recul notamment par rapport aux champions asiatiques. Le déclin est une évidence : la France a de la peine aujourd’hui à justifier sa place dans le concert politique des nations. Elle bénéficie d’une place privilégiée à l’ONU parmi les cinq membres permanents du Conseil de sécurité, mais elle n’a plus les moyens de posséder les deux porte-avions indispensables à sa présence militaire dans le monde. La Chine est à la veille de produire son troisième.

La décadence est ce qui empêche de mesurer l’importance du déclin et de mobiliser l’énergie nationale pour y remédier. Il y a en France toute une série de forces qui aveuglent notre pays sur sa situation et son avenir parce qu’elles concentrent l’attention de médias complices et donc de l’opinion publique sur des sujets secondaires qui ont pour caractéristique principale d’entraîner des mesures qui affaiblissent les capacités de résistance du pays et d’inhiber sa résilience. L’une des faiblesses essentielle de notre pays est sa démographie. Il est aujourd’hui clair qu’il n’est plus capable de maintenir voire d’accroître sa population que grâce à l’immigration, une immigration de plus en plus africaine et musulmane, rétive à l’assimilation. Or les idéologies “environnementalistes” ou de libération sexuelle ont pour effet, pour la première de réduire la production nucléaire d’électricité, pour la seconde de désintégrer la famille et de diminuer le nombre des naissances.  L’immigration assimilée était effectivement une chance pour la France. Or, l’importation des déviances idéologiques américaines du wokisme et de la Cancel cuture s’ajoute aujourd’hui à l’anticolonialisme pour mettre en accusation notre pays, son histoire, ses traditions, la religion qui a forgé son identité pour le conduire à la repentance et l’abandon de toute fierté nationale. On ne risque pas d’assimiler des étrangers à une nation qui s’excuse d’être ce qu’elle est.

Or, c’est cette indispensable fierté de notre passé qui peut susciter notre foi en l’avenir, l’arme psychologique pour freiner et peut-être inverser le déclin.

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4 commentaires

  1. Ce n’est pas sa démographie qui est la faiblesse essentielle de notre pays Une France avec 45 millions d’habitants c’était largement suffisant Et il suffisait d’inciter les mères FRANÇAISES à faire des enfants en lui attribuant un salaire en restant au foyer le temps d’en élever 2 a trois jusqu’à leur relative autonomie pour que le renouvellement de la population se fasse.
    Mais non il fallait les inciter à travailler à la chaine et en usine car le salaire du mari ne suffisait pas et puis rester à la maison ce n’était pas la “libération de la femme”
    Le reste ce sont des mauvaises raisons pour permettre à Bouygues d’avoir des ouvriers à bas prix , d’où l’immigration Et l’immigration EST à présent le problème PREMIER le déclin et la décadence c’est comme pour Rome, le moment où l’on fait venir les Wisigoths pour NOUS remplacer !

    1. La démographie n’est pas le nombre statique d’une population mais son évolution dynamique. La population française aurait dû avoir un optimum de 75 millions en 1945 d’après Sauvy. Elle y arrive mais avec des tranches d’âges de plus en plus mal équilibrées et un renouvellement qui se fait à partir d’une immigration non assimilée. La politique familiale était donc essentielle : elle devait reposer sur la préférence nationale et sur son financement par la TVA sociale, c’est-à-dire l’impôt, politique que j’ai toujours défendue et qui a été au contraire abandonnée.

  2. Je crains que ce ne soit toute notre Humanité qui évolue vers son déclin, quand on constate la manière dont elle ramène sa science pour s’autodétruire au détriment des recherches et des initiatives pour sa propre survie.
    ex: La “bombe nucléaire” est exploitée depuis 1945 et on se bat encore pour l’avoir, alors que la “bombe antivirale”, ce n’est pas pour demain.

  3. La démographie n’est ps vraiment en cause. La France participe de l’entropie générale de l’Occident mais au sein de celui-ci elle ne pèse plus beaucoup. Il y a un déclassement dans le groupe déclassé. Vous signalez la charnière du déclin après la décolonisation mais je la situerais plutôt à la sortie du quinquennat Pompidou. Déjà le franc glissait contre le marc allemand depuis 1965 env. et si les retards considérables de développement acceptés sous l’ère gaullienne pour financer notre “grandeur” avaient engloutis beaucoup d’impôts, il y avait indéniablement un effritement de notre compétitivité industrielle, qui sera ruinée plus tard par l’arrivée des archéo-socialistes au pouvoir.

    Qu’on se souvienne qu’avant 1960 on pouvait fabriquer n’importe quoi de mécanique tout au long de la rue du Landy, un char, un canon, des moteurs de bateaux, des roulements, des locomotives etc…
    Le Plan à la soviétique a fait plus de mal que de bien. Nous avons depuis trente ans une industrie d’assemblage qui importe ses composants primaires. Au mode jacobin d’une production caporalisée financée par l’Etat, la fameuse “economie-mixte” qui n’a jamais convaincu aucun de nos voisins sauf l’Italie pour quelques fleurons menacés, s’est ajouté l’empâtement étatique et la politique sociale qui ont dévié la production de richesses vers l’inutile et la corruption.
    Le pays le plus taxé ne pense s’en sortir qu’en taxant plus ! On est morts !

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