Cette nuit, je suis intervenu afin de défendre un amendement de l’opposition visant à instaurer une évaluation d’Hadopi. Je vous rappelle que la loi DADVSI prévoyait un rapport d’évaluation : « Le Gouvernement présente au Parlement un rapport sur la mise en œuvre de l’ensemble des dispositions de la présente loi dans les dix-huit mois suivant sa promulgation. Ce rapport comporte un chapitre spécifique sur les conditions de mise en place d’une plateforme publique de téléchargement permettant à tout créateur vivant qui se trouve absent de l’offre commerciale en ligne de mettre ses œuvres ou ses interprétations à la disposition du public et d’en obtenir une juste rémunération. » Malgré mes demandes répétées au Gouvernement, à Jean-Luc Warsmann, Président de la Commission des Lois, et à Jean-François Copé, cette évaluation m’a toujours été refusée. Compte-rendu de mon intervention :
M. Christian Vanneste. Je suis stupéfait de voir que ni le rapporteur ni la ministre n’apportent jamais de réponse positive. Il faut parfois savoir faire des ouvertures, et on ne vote pas une loi en repoussant systématiquement toutes les propositions, alors même qu’elles sont parfois pleines de bon sens. Davantage d’ouverture d’esprit faciliterait beaucoup le travail parlementaire.
J’entends dire par ailleurs qu’il n’y a pas de loi DADVSI. Mais il y en a une : la preuve en est que vous légiférez précisément pour la modifier ! Je rappelle en effet que la loi DADVSI comportait le principe d’une riposte graduée fondée sur un système d’amendes et que c’est en raison de l’annulation de ce dispositif par le Conseil constitutionnel que nous nous trouvons avec une peine disproportionnée – trois ans de prison et 300 000 euros d’amende qui punissent la contrefaçon. C’est ce qu’entend modifier la loi actuelle. La loi DADVSI existe donc.
Cela dit, elle aurait beaucoup mieux existé si, comme la loi elle-même l’exigeait, elle avait été évaluée. En effet, si le Gouvernement avait pratiqué, comme j’en faisais la demande, l’évaluation à laquelle il était contraint dix-huit mois après le vote de la loi, peut-être l’exécutif et le Parlement auraient-ils pu rectifier le tir sans faire appel à quelqu’un d’extérieur au monde politique, brusquement considéré comme un « super sachant », par rapport aux parlementaires incapables de faire quoi que ce soit de bien.
J’ai beaucoup d’admiration pour les cinéastes et pour celui qui est ici, mais ce sont les parlementaires qui font la loi, et non les cinéastes qui sont dans les tribunes ! Nous devons viser le bien commun et non l’intérêt de telle ou telle profession, quel que soit son intérêt artistique ou économique.
Je voudrais dire enfin que, pour les adversaires du texte comme pour se partisans, la proposition de Mme Erhel ne peut être que positive. Il n’y a rien de contestable en effet à vouloir savoir, un an ou deux après le vote de la loi, quels ont été ses effets. Soit elle aura répondu à vos attentes et porté ses fruits, madame la ministre, et dans ce cas vous aurez gagné ; soit, comme nous le pensons, elle se révélera inefficace et nous le regretterons, notamment pour les cinéastes et pour les musiciens.
Je demande donc au rapporteur et à la ministre de revenir sur leur opposition, qui n’a aucun sens. En acceptant cet amendement, vous ferez preuve d’ouverture d’esprit et vous ferez progresser le texte, au-delà de l’affrontement gauche-droite auquel nous assistons depuis une semaine.
M. Jean Dionis du Séjour. Très bien !
Mme la présidente. La parole est à Mme Christine Albanel, ministre de la culture.
Mme Christine Albanel, ministre de la culture. Nous avons déjà eu sur ce texte quarante-deux heures de débat et adopté deux cent soixante amendements.
M. Christian Vanneste. Ce n’est pas à un ministre de juger de la durée d’un débat parlementaire !
Mme Christine Albanel, ministre de la culture. Je ne juge pas de la durée du débat mais rappelle un fait. Quant à l’adoption des deux cent soixante amendements, elle signifie que le texte a considérablement évolué et qu’il a été amélioré.
M. Patrick Bloche. Ce n’étaient que des amendements du rapporteur !
Un commentaire
Certains producteurs, acteurs, investisseurs et d’autres qui gravitent autour de la réalisation d’un film se plaignent que leur cupidité puisse être menacée et qu’il leur faille en fait travailler réellement à produire de nouveaux films au lieu de vivre sur une rente de situation parce qu’ils ont créé 1 film il y a … quelques années.
Pour leur assurer des profits parfois éhontés parce qu’hors de proportion avec une rémunération décente de leur travail (profits qu’ils mettent d’ailleurs bien à l’abri de toute imposition) ils veulent encadrer l’accès à la culture et vont finir par la tuer.
En effet, du propre aveu des boulimiques des super profits à bon compte, un film est environ 6 mois dans le circuit des salles de cinéma et des réseaux Télé payants spécialisés, puis 6 mois en DVD puis passe (éventuellement, et avec de la chance) sur les chaînes gratuites.
Dans ce laps de temps un certain nombre de films (pour ne pas dire un nombre certain) est « passé » à la trappe pour un tas de raisons.
N’apparaissant plus dans les circuits traditionnels marchands, ils disparaissent petit à petit et dans cette marche vers l’oubli, le bon côtoie le médiocre …avec seulement de temps en temps un rappel à la vie pour meubler un programme …
Donc, si le téléchargement peut apparaître contestable pour des films de moins d’un an, (il faudrait pourtant se (re)poser la question du prix des places pour des jeunes ou des familles n’ayant pas les moyens de mettre 8 à 9€ par personne…) pourquoi cette chasse au méchant voleur de profit pour toutes les œuvres sans exceptions … pourquoi pas interdire seulement le téléchargement pour des films de moins d’un an et laisser la chance d’une seconde vie à des œuvres plus anciennes qui sinon vont complètement disparaître .
Le même schéma peut être appliqué pour les œuvres musicales
Les défenseurs de la Culture ne sont-ils que les défenseurs de la Culture du Fric ?