La “Phobie” des Réformes Structurelles !

S’il fallait réécrire le Mal Français que son auteur, Alain Peyrefitte avait désigné comme la société de méfiance, incapable d’affronter le grand large de la compétition internationale, il faudrait employer systématiquement le pluriel : la France se méfie de tout, de son passé, de son avenir, des réformes, par-dessus tout. La France classique, disant beaucoup en peu de mots, pensant clairement, bâtissant avec ordre et élégance, réformant méthodiquement mais fermement, affrontant avec courage le monde entier au besoin, est devenue une société byzantine où des élites formées par un enseignement suicidaire, ressassent les idées creuses et les formules compliquées qui justifient leur impuissance ou leur nocivité. Georges Pompidou avait écrit le “Noeud Gordien”. Le dernier grand Président avait vu juste : il fallait trancher. On n’a pas dénoué. On a au contraire noué davantage avec le regard brillant du fort en thème ravi de son intelligence inutile.

Jean-François Copé affirme qu’il soutiendra les réformes structurelles du gouvernement si celui-ci a le courage de les entreprendre. Excellent ! Mais alors pourquoi ne pas les avoir réalisées pendant ces dix dernières années durant lesquelles son parti détenait le pouvoir ? Pourquoi le proposer alors que l’idéologie et le programme de la gauche s’y opposent “structurellement” ? Pourquoi les évoquer quand la direction prise à la suite du rapport de commande de M. Gallois, qui les légitime, annonce le recours à de nouvelles demi-mesures complexes ? Il faut prendre garde : notre pays béni des dieux a pris du retard, non seulement sur les courageux qui ont fait les réformes, il y a vingt ou trente ans, mais sur ceux qui les conduisent aujourd’hui à marches forcées. La dégradation du AAA français par Moody’s est claire : pendant des années, vous n’avez pas fait le nécessaire et maintenant vous ne faîtes pas le suffisant.

La peur des réformes structurelles se nourrit de tous les intérêts catégoriels ligués contre le Bien Commun : syndicats, partis politiques et pouvoirs locaux, administration jalouse de son pouvoir, professions protégées. Le dernier mandat présidentiel aura poussé à son maximum le décalage entre le discours réformiste et la réalisation traditionnelle, à la française : demi-mesures, complexité, effets pervers et à l’arrivée, la victoire de la gauche qui détricote sans difficulté une politique sans résultat. Au lieu de l’abrogation des 35 heures, y compris dans les services publics (!), les heures supplémentaires. A la place de la suppression de l’ISF, un renforcement du bouclier fiscal. Non pas, comme annoncé, la fin de la “stupide” Taxe Professionnelle, mais un rabais, coûteux pour les finances publiques, compliqué, et pénalisant pour certaines entreprises, baptisé CTE. Enfin un hoquet législatif sur TVA qui ne risque plus d’être un choc de compétitivité lorsque nous serons les derniers  à augmenter le taux normal en baissant les charges ! Lovées au coeur de ces mesures, l’hydre des 2600 seuils du code des impôts et l’obsession française de punir la réussite, de taxer deux fois, par exemple une entreprise, sur ses bénéfices et sur sa valeur ajoutée, deux monstres qui expliquent, entre autres, les délocalisations des activités, des talents et des fortunes.

Hélas, cette pathologie nationale ne sévit pas que dans l’économie. Le Conseiller Territorial, timide et hypocrite réforme sur la voie de la disparition des départements vient de succomber. Le salmigondis des modes de scrutin entre les élections nationales, locales et européennes a conduit logiquement au maintien du FN, et aujourd’hui sans doute à l’éclatement de l’UMP. La généralisation du scrutin uninominal aurait “sanctuarisé” le système bi-partisan et conduit à ce qu’une partie de l’UMP soit centriste et une autre très à droite. On se retrouve aujourd’hui avec à nouveau, l’UDI-UDF, l’UMP- RPR et le FN, en s’interdisant une alliance avec celui-ci et un risque de troisième force UDI-PS : Gribouille n’aurait pas mieux fait. Je pourrais encore allonger la liste avec la réforme pénitentiaire pleine de contradictions, les offensives suivies de retraites élastiques sur l’immigration, la nationalité ou l’identité. Mes interventions à l’Assemblée et mes propositions de loi ont scandé ma déception grandissante. Quand on est incapable de faire des réformes, on crée les conditions d’une Révolution, que j’espère encore conservatrice !

 

 

 

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4 commentaires

  1. C’est vrai qu’avec son avance de 98 voix sur François Fillon, le Maire de Meaux est tout aussi légitime à être le candidat de sa famille politique pour l’élection présidentielle, que ne l’était Martine Delors après le Congrès de Reims.

  2. Si, pour n’avoir pas encore essuyer les conséquences de la rigueur qui nous pend au nez, les conditions pour une révolution ne sont pas à l’ordre du jour, en ce qui me concerne, la révolution conservatrice, elle, a déjà un goût périmé.
    Autrefois, en regardant des films sur la révolution française, je m’offusquais de voir des femmes accompagnées de leurs enfants se délecter du spectacle d’une tête coupée en place publique. Aujourd’hui, je les comprends et si je n’en suis pas encore à applaudir, je suis sûre de n’être déjà plus à même de détourner les yeux si demain, les pourris qui ont vendu peuple et nation devaient être châtiés par le peuple. La haine, c’est comme l’amour, aveugle et sans maître.

  3. “Quand on est incapable de faire des réformes, on crée les conditions d’une Révolution, que j’espère encore libérale !” vouliez-vous certainement écrire !

  4. Il s’agit bien sûr de la “Révolution Conservatrice”, cette forme de pensée qui correspond soit à la réflexion de philosophie politique allemande des lendemains de la 1ère guerre mondiale, avec Spengler par exemple, soit au mouvement de réforme lancé par Reagan aux USA et surtout par M. THATCHER au RU. Dans les deux cas, cela allie le libéralisme économique avec le conservatisme sociétal.

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