Démocratie : la fin d’une illusion ?

FlutisteMussolini aurait lancé sur un mode ironique une provocante définition de la démocratie : ” C’est le gouvernement qui cherche à donner au peuple l’illusion qu’il est souverain”. Les coups de boutoir de ce que le microcosme appelle dédaigneusement le populisme sont comme les ruades d’un cheval fatigué de son maître. Ils ne sont qu’un moment entre deux soumissions. Ils se multiplient dans les démocraties occidentales dans la mesure où le maître paraît tellement peu soucieux du bien-être de son cheval et à ce point inapte à le bien diriger que celui-ci ne le supporte plus. Lorsque les privilèges accordés à une oligarchie sont sans mesure avec ses capacités et la mettent cependant à l’abri de sa mauvaise gouvernance, les peuples n’en peuvent plus : ils craquent. L’Italie vient de vivre une situation de ce genre. Le référendum, trop rare, a été saisi non comme le moyen d’exprimer un avis sur une réforme, comme les Suisses le font régulièrement et dans le calme, mais comme l’occasion de dire non à un système étouffant. Les Etats qui jouissent d’une meilleure situation économique et sociale et qui subissent le poids d’une repentance historique, injustifiée sur les générations actuelles, parviennent mieux à faire entendre raison au peuple. Une fraude et l’éloignement dans le temps d’une élection par trop marquée par la “crise” migratoire” ont permis d’éviter l’élection d’un souverainiste en Autriche. Les Etats-Unis se sont divisés entre les Etats qui vivent bien la mondialisation, la circulation sans frontières des personnes et des biens, et ceux pour lesquels elle est perçue comme une agression. Malgré un rouleau compresseur médiatique en faveur de Clinton, c’est Trump qui a emporté la majorité des grands électeurs.

On mesure la déception de “l’Etablishment” à la campagne qui continue sournoisement d’insinuer l’illégitimité du candidat élu. Il serait le produit d’une manipulation russe. Comme si l’idée d’un rapprochement entre la Russie et les Etats-Unis, loin d’être un facteur de paix décisif pour le monde, était une menace pour l’Europe orientale ou pour la puissance américaine. Alors que l’administration démocrate actuelle n’a plus qu’une quarantaine de jours à vivre, elle multiplie les insultes à l’encontre de la Russie, parlant de crimes contre l’humanité, quand le principal forfait commis dans la tragédie syrienne a consisté à soutenir des rebelles, majoritairement islamistes, dans un pays avec le but d’en renverser le gouvernement légal. Le bombardement médiatique que subissent les populations occidentales a été le même à propos de la Syrie que naguère en Libye ou sur bien d’autres théâtres d’opérations, auparavant, de la Roumanie à l’Ukraine. Tandis que l’armée syrienne est en passe de reconquérir le 1/10éme d’Alep où les “rebelles” se sont concentrés en prenant la population en otage, comme par hasard, elle subit, après quelques bombardements “accidentels” de la coalition, le retour des djihadistes de l’Etat islamique à  Palmyre. Comment admettre que vingt pays, parmi lesquels les plus puissants ou les plus riches du monde, n’aient pu parvenir à écraser le prétendu “Etat islamique” ? Les avancées dérisoires célébrées par François Hollande sur le Charles de Gaulle s’inscrivent dans une manipulation à l’échelle planétaire. Certes on pourrait comprendre la crainte de reprendre les villes avec les conséquences sur la population civile, mais la circulation de groupes armés sur de grandes distances dans un secteur découvert voire désertique ne peut se faire sans complicité. Depuis des décennies, les Etats-Unis ont choisi l’alliance dangereuse avec l’islamisme. La France a suivi. Le piège se referme sur les peuples occidentaux, avec le terrorisme. On ne peut impunément être l’ami d’un Etat islamique officiel, comme l’Arabie Saoudite ou le Qatar, et faire la guerre sérieusement à un Etat islamique officieux.

La manipulation de l’opinion par une caste, qui ne vise même plus l’intérêt supérieur d’une nation qu’il est parfois difficile d’informer complètement, mais n’a pour objectif que de s’accrocher à son pouvoir et à ses jouissances, dissipe l’illusion démocratique. Dans une Europe qui est devenue une flotte ivre, on ne sait qui souffle les ordres qui viennent d’en haut, mais on sait que les capitaines des navires, pourtant élus en-bas, eux, ont été déchargés de l’essentiel de leur commandement et de leurs responsabilités. Alors, le peuple britannique fier d’une indépendance sauvegardée depuis 1066, s’est libéré, jetant le désarroi chez les technocrates. Le génial Président de la Commission bruxelloise, sans doute touché par l’ivresse du pouvoir, en a conclu qu’il fallait interdire les référendums. La France, qui aime vivre à contre-courant, et qui depuis quelques années voyait monter le populisme, semble renouer avec l’espérance démocratique. Les élections primaires de la droite et du centre ont été une réussite. Plus de quatre millions de personnes y ont participé. François Fillon, un gaulliste plutôt libéral et conservateur, dans la tradition d’un Pompidou, a été élu. C’était le meilleur choix, mais un gaulliste désigné par un scrutin organisé par un parti, et par 10% du corps électoral, c’est américain, et pas du tout gaulliste. Un homme seul qui se présente devant le peuple, soutenu par un mouvement plus qu’un parti, l’est davantage. Macron gaulliste ? Quelle blague ! C’est Lecanuet un demi-siècle plus tard, le terrain en moins,  le monsieur X des lobbys, des coteries, des médias et des puissances d’argent qui les financent : un produit publicitaire plus qu’un candidat, avec ses slogans, son style, ses recettes. De la technique mêlée à de la démagogie, mais une absence totale d’authenticité. Le lendemain de l’élection présidentielle, le mirage démocratique se dissipera-t-il à nouveau ? Certes, il y aura peut-être des référendums qui déborderont une majorité parlementaire peu représentative. Mais qui aura le courage en France d’instaurer le Référendum d’Initiative Populaire pour donner à la démocratie un peu de vérité ?

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9 commentaires

  1. Je crains qu’au contraire il ne soit plutôt question d’encadrer l’usage du référendum au niveau européen. Le référendum est, par définition, une expression démocratique nationale, chose qui être insupportable pour la caste bruxelloise.

    La Grande Bretagne et l’Italie sont deux exemples qui leur donnent de bonnes raisons de lutter farouchement contre et, à défaut de l’abolir, de fortement en limiter l’usage et la portée.

    En mars prochain, la Commission va publier un livre blanc sur le projet européen ; il faudra lire les lignes et entre les lignes aussi…

    Je pense que la possible tentative de mainmise européenne du scrutin référendaire va être un de nos prochains combats et il faut impérativement que ce mode de consultation électorale demeure du ressort exclusif des nations.

  2. ” Qui aura le courage en France d’instaurer le Référendum d’Initiative Populaire pour donner à la démocratie un peu de vérité ? ”

    Les contraintes juridiques françaises, telles qu’on a pu les observer avec les lois ordinaire et organique sur le RIP de 2008 (avis de la CNIL, délai de 18 mois), rendent quasiment impossible un tel référendum, sauf grand chambardement de la Constitution. Qui en aura le courage intelligent (ou l’intelligence courageuse) ??

    https://laconnaissanceouverteetsesennemis.blogspot.fr/2015/03/mes-suggestions-de-revision.html

    1. J’avais déposé une proposition de Loi en ce sens. Ce que nous avons voté en 2008 a été aménagé par la suite de façon à être infaisable.

      1. Monsieur VANNESTE, je pense que des dispositifs tels que :
        – le référendum d’initiative populaire,
        – le scrutin au jugement majoritaire,
        et de manière plus générale, tout ce qui pourrait enfin institutionnaliser des prérogatives de proposition ET DE DECISION pour la socitété civile, devraient être inscrits dans la constitution.

        Pas dans une loi.

        Par ailleurs, j’apprécierais beaucoup, ci cela vous est possible, avoir accès au projet de texte de loi que vous mentionnez dans votre réponse.

    2. Ma proposition de Loi de 2011 signée par de nombreux parlementaires est la transposition du système de votation suisse avec trois types de scrutins : le vote veto contre une loi votée par le Parlement ; le vote initiative à partir d’une proposition ; et la réforme constitutionnelle avec à chaque fois un niveau plus élevé de signatures requises pour que la pétition soit reçue. 1 Million pour la 3e. La régularité et la multiplicité des référendums excluent de les transformer en plébiscites. Evidemment en France, les cabinets et la haute fonction publique s’y opposent !

  3. Bonjour Christian ,
    La démocratie ? la liberté d’expression ?? Mon œil !
    Après mes commentaires acides mais lucides sur ton blog du 5 /12 sur Castro et la démocratie je me suis retrouvée déconnectée d’Internet mystérieusement le lendemain et en attendant mon technicien bloqué à Lyon par la circulation alternée ce n’est que ce matin que j’ai été reconnectée . Des espions partout pour me museler !!!
    Merci pour tes écrits sur la Syrie ! c’est tout vrai .
    Amitiés .Rita

  4. @ Monsieur le Député:

    ” Mais qui aura le courage en France d’instaurer le Référendum d’Initiative Populaire pour donner à la démocratie un peu de vérité ? ”

    Ce n’est pas une question de courage mais de réalisme: lorsqu’ils renoncent à la démagogie, les individus de droite qui ont des ambitions élyséennes votent par crainte de la peine d’inéligibilité, comme conséquence d’une condamnation pénale juridiquement infondée. D’ailleurs, c’est si vrai que certains magistrats viennent de débuter leur campagne présidentielle contre un ancien Ministre de l’Economie du Président Sarkozy et de son Premier Ministre.

  5. “Qui aura le courage en France d’instaurer le Référendum d’Initiative Populaire pour donner à la démocratie un peu de vérité ?”
    on peut toujours en parler à Fillon; qui sait ?

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