L’Europe Eclatée.

Francois-Hollande-Angela-Merkel_pics_390LE cinquantième anniversaire de l’amitié franco-allemande manquait de chaleur. David Cameron annonce un référendum au Royaume-Uni en 2017, si les conservateurs obtiennent encore la majorité afin que le peuple britannique décide ou non de rester dans l’Union Européenne. Le rêve politique européen a, depuis longtemps laissé la place à une machine qui ne subsiste qu’en poursuivant un mouvement qui a de moins en moins de sens. On comprend bien l’intérêt des technocrates, et aussi celui des politiciens des petits pays qui n’ont jamais été des Nations, à s’enfoncer dans une intégration toujours plus poussée, mais les peuples se sentent de moins en moins impliqués dans une construction qui s’opère malgré eux et dont ils ne perçoivent plus les avantages.

Dans les débats, la plupart des responsables politiques citent la paix comme le premier de ceux-ci. Comme si après deux guerres mondiales suicidaires, le continent qui les avait déclenchées et principalement subies, coupé en deux par les blocs qui se partageaient le monde, avait encore les moyens de se livrer à des guerres. L’Europe de l’Ouest, à l’abri du bouclier américain, porté par une démographie et une économie d’après-guerre, a collectionné les miracles et les trente glorieuses. Le Marché Commun y a concouru mais n’a pas créé le phénomène. Aujourd’hui, l’Europe est déchirée entre le nord protestant et le sud catholique, les pays qui ont fait les réformes à temps et ceux qui ont laissé grossir la dépense publique, la dette et l’Etat providence. On dira que les pays scandinaves ont une dépense publique considérable et que la Bavière ou l’Autriche sont catholiques. Oui, mais la frontière passe bien entre les peuples et les Etats qui ont eu le courage des réformes et les autres. La France est au sud de cette frontière. La comparaison avec l’Allemagne est éclairante : la France a choisi le chômage (10%) et la stabilisation de la pauvreté (14%) par des amortisseurs sociaux qui ressemblent à de la morphine. On ne sent pas la douleur, mais à la longue et en douceur, on en meurt. Le plan Ayrault contre la pauvreté annoncé aujourd’hui même avec ses 10% de places en crèche pour les plus démunis, l’augmentation du RSA  et son ouverture aux 18-25 ans, les 8000 places d’hébergement et la hausse du plafond ouvrant à la CMU complémentaire développe l’assistance et augmente la dépense publique en enfonçant la France et les Français dans le piège mortel où ils sont engagés depuis plus de trente ans. L’Allemagne, dont on oublie un peu vite qu’elle a dû, contrairement à la France libérée de ses colonies, absorber la zone d’occupation soviétique et son retard économique, a aujourd’hui gagné son pari. Si le Mark était trop lourd pour l’est, l’Euro n’est trop lourd que pour les pays qui avaient l’habitude de compenser leurs retard par des dévaluations. Ce n’est pas le cas de l’Allemagne qui a opéré le choix symétrique de la France : elle a choisi le travail ( (5,4% de chômeurs) mais au prix d’une augmentation de la pauvreté (16%). La différence réside dans le fait qu’il s’agit d’une thérapeutique destinée à soigner le malade et non de soins palliatifs atténuant la douleur. L’Allemagne a sauvé et développé son industrie. Celle-ci représente 29% du PIB et a cru de 33% entre 1997 et 2007. En France, elle a chuté de 30% à 14%. L’Allemagne dépose 18,2 % des brevets européens, la France 6,2%. En  réduisant son déficit public et son endettement, en maintenant son excédent commercial, et avec son niveau de PIB/habitant, l’Allemagne peut accroître la demande et contribuer à la relance des pays du sud. Déjà, elle offre du travail à leurs ressortissants, mais il faut aussi que ces pays fassent des efforts. La France généreuse, accueillante et un peu condescendante des rencontres Adenauer-De Gaulle a laissé la place à la France mauvaise élève à côté d’un premier de classe qui se veut bon camarade, du couple Hollande-Merkel.

Les contraintes européennes obligeaient à la vertu des pays qui n’en avaient pas l’habitude. Comme beaucoup ne s’y sont pas soumis, ils ont perdu ce bénéfice pour ne garder de leur intégration dans l’Union et a fortiori dans l’Euroland que le poids d’une machine tatillonne et peu efficace, un grand nombre d’institutions et de responsables superflus et encombrants, et des projets mirifiques présentés par ceux-ci afin de justifier leur existence. La stratégie de Lisbonne dont le désastreux échec avait été perçu cinq ans après son lancement,  dès 2005, a laissé la place à la stratégie 2020. Dans les deux cas, les objectifs prétentieux sont hors d’atteinte. Taux d’emploi à 75% ? Une plateforme pour diminuer le nombre de 20 millions d’Européens touchés par la pauvreté ? Une réduction des émissions de gaz à effet d serre de 20% ? La cure d’austérité est nécessaire mais elle ne pourra  avoir des effets positifs sur le chômage et la pauvreté qu’à long terme. Auparavant ses conséquences seront négatives et tout le monde le sait. Quant à l’environnement, il a perdu de son urgence avec la crise au point même que l’Allemagne est revenue au bon vieux charbon et donc au CO2 par crainte du nucléaire. La brutalité de la décision allemande a révélé deux faiblesses des démocraties européennes : les Etats décident en fonction de leurs intérêts électoraux immédiats. L’écologie qui devrait poser des problèmes de long terme est vécue comme une mode dont les pressions sur l’opinion sont contradictoires : un jour, non au nucléaire ; le lendemain, non au gaz carbonique.

La question a été pendant longtemps de savoir s’il fallait approfondir ou élargir l’Europe. On a voulu faire les deux avec un approfondissement optionnel mal contrôlé puisque sont entrés dans l’Euro des pays qui n’en avaient pas les moyens tandis que ceux qui pouvaient ne l’ont pas souhaité. On a compensé l’absence de visibilité politique de l’Europe par des nominations illusoires. L’absence de Madame Ashton dans la crise du Mali ne surprend personne. La France a pris ses responsabilités, et si elle est seule, c’est aussi parce que seuls des Etats peuvent s’engager dans l’urgence. L’Europe, l’Europe des Nations doit appeler les Etats à assumer plus de responsabilités, non à les fuir grâce au “machin”européen. C’est pourquoi la solidarité européenne ne doit être ni approfondie, ni élargie, elle doit être repensée. Certains voudraient réparer toutes ces erreurs en accentuant le processus qui les a  engendrées. Einstein disait qu’on ne pouvait résoudre des problèmes avec ceux qui les ont créés.

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3 commentaires

  1. @ Monsieur le Député:

    ” David Cameron annonce un référendum au Royaume-Uni en 2017, si les conservateurs obtiennent encore la majorité afin que le peuple britannique décide ou non de rester dans l’Union Européenne. ”

    Rappelons que Nicolas Sarkozy avait justifié la ratification du Traité (simplifié) de Lisbonne par voie parlementaire pour éviter la tenue d’un référendum au Royaume-Uni: cest donc qu’il savait que le résultat en serait négatif.

  2. Cher Monsieur, je me permets de laisser un commentaires sous votre post ininterressant car je suis trouble. Vous vous annoncez comme etant Depute. Mais sauf erreur de ma part vous avez ete battu lors des dernieres elections legislatives. Le terme “honoraire” que vous prenez d’adjoindre au terme de Depute me semble etre un detournement de la Loi, pouvant induire en erreur les lecteurs de votre blog. L’expression “ancien depute” ou “ex-depute” me semble mieux approprie vous concernant. Je vais me renseigner pour savoir si vous avez effectivement le droit d’utiliser ou non cette expression. Si oui, je vous presente mes respectueuses excuses pour cette intrusion. Si non, je ferai tout ce que je peux pour vous en empecher.

    Ca ne vous evoque rien ma reaction ? C’est un peu la meme chose que d’empecher l’egalite des droits par exemple pour le mariage pour tous…. Meme si moi je vous l’affirme ca ne me retire rien…

    Cordialement.
    Davy TABARY (sans etiquette politique)

    1. Je redécouvre ce message par hasard en cherchant autre chose. Son caractère obsessionnel, hargneux et hypocrite à la fois est très représentatif d’une certaine psychologie. Quant au titre, j’y ai bien sûr droit pour avoir servi la République pendant au moins 15 ans, ce qui n’est pas le cas de tout le monde.

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