Remise de mon rapport sur le Travail d’Intérêt Général à Michèle ALLIOT-MARIE, Ministre d’État, Garde des Sceaux

Ministère de la Justice et des Libertés/DICOM/C. Montagné
Ministère de la Justice et des Libertés/DICOM/C. Montagné

Cet après-midi, je remets mon rapport. Commencé il y a six mois, après douze auditions, et deux déplacements à l’étranger dont l’un a été financé par la confédération helvétique et dont l’autre a été intégré à la mission consacrée aux autorités administratives indépendantes, celui-ci formule 30 propositions. J’avais manifesté mon intérêt pour ce type de peines lors du débat sur le texte d’Éric CIOTTI visant à lutter contre la délinquance en bandes et aussi lors de la loi pénitentiaire.

Aujourd’hui, mon interrogation s’est transformée en une triple certitude :

D’abord, le travail d’intérêt général est une peine positive, à la fois punitive, restauratrice de la personne et éventuellement formatrice. Elle permet à la société dans son ensemble de participer à l’application de la justice alors que celle-ci est trop souvent considérée comme une affaire de spécialistes. Elle recèle une dimension humaine que ne possède pas le bracelet électronique.

En second lieu, il est paradoxal que cette sanction demeure marginale. On est passé de 10993 TIG en 1994 à 15770 en 2008. Les sursis TIG diminuaient de 10682 à 8854. Il est frappant de constater que le nombre des TIG a évolué positivement lorsque la majorité nationale était à droite avec des pics en 1997 et 2006 et des creux avec la gauche notamment en 2002. On avait reculé de 12789 à 8853. En revanche il faut regretter un petit recul sur les années 2007 et 2008. Comment expliquer qu’une peine approuvée très largement soit aussi peu développée ? Deux causes sont à souligner : le manque de volonté, et le manque de rigueur dans la mise en œuvre. Des retards dans l’exécution vont assez fréquemment jusqu’à l’empêcher totalement. La part des mesures non exécutées est supérieure ou égale à 10% dans 22 des 181 TGI.

Enfin, il convient de faire preuve d’optimisme pour l’avenir. Les exemples étrangers sont des réussites. En France déjà, dans le Val d’Oise par exemple, des expériences comparables sont réalisées avec succès. Il s’agit donc dans un premier temps de systématiser des expérimentations, par exemple dans le cadre de CLSPD volontaires qui permettront de créer la synergie indispensable entre l’institution judiciaire et les acteurs locaux. Celles-ci auront pour but de tester l’utilisation de procédures et de documents uniformes et méthodiques. Il sera aussi indispensable d’adapter les TIG au profil du condamné (du TIG pédagogique du week end jusqu’à l’atelier forestier pour 200 à 300 heures) et de spécialiser des membres des Services Pénitentiaires d’Insertion et de Probation dans le suivi des TIG et dans la recherche et la fidélisation des partenaires. Afin de faciliter leur recrutement, il pourra être fait appel à la réserve civile ou au service civique. Il sera nécessaire que des tuteurs soient désignés et formés à cette fin dans le cadre des partenariats. Ceux-ci pourront être très divers, allant des grandes entreprises nationales comme la SNCF, des associations comme la Croix Rouge jusqu’à des associations plus locales qui pourront organiser de manière systématique les TIG dans un secteur donné, comme cela existe en Suisse.

Les objectifs sont donc assez précisément définis. Il faut maintenant souhaiter que la volonté politique et la bonne volonté des acteurs puissent aussi se déployer.

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2 commentaires

  1. Où peut on consulter votre rapport ? Je serais vraiment très intéressé.

    Pour le reste, il se trouve que le projet de loi sur la burqa arrive devant les députés. Comptez vous vous opposez à celui ci…Non pas sur la forme – le principe en tant que tel est bon – mais sur le fond ?

    Le vote d’une loi contre le port du voile intégral rassurerait peut-être l’électorat courtisé par l’UMP, mais il pourrait fournir à cette pratique une publicité inespérée, faute de s’appuyer sur des bases juridiques suffisamment solides.

    Inutile d’invoquer la laïcité : « Elle ne peut s’imposer directement à la société ou aux individus qu’en raison des exigences propres à certains services publics (comme c’est le cas des établissements scolaires). » La sauvegarde de la dignité humaine ne serait pas une base beaucoup plus solide. En effet, la Cour européenne des droits de l’homme l’a jugée indissociable de la protection du “libre arbitre”, tandis qu’elle se penchait sur les évanouissements d’une femme soumise aux sévices de deux complices : les salafistes peuvent compter sur le soutien des sadomasochistes ! Quant à la sécurité publique, elle constituerait « un fondement très solide pour une interdiction de la dissimulation du visage, mais seulement dans des circonstances particulières » ; en l’absence de troubles avérés, une interdiction générale reposerait « sur une logique artificiellement préventive » – laquelle n’a jamais été admise par la jurisprudence.

    En définitive, seule une acception élargie de “l’ordre public” pourrait s’accommoder de la lubie présidentielle. Il faudrait y voir, selon les termes du Conseil d’État, « le socle d’exigences réciproques et de garanties fondamentales de la vie en société ». « Mais une telle conception, juridiquement sans précédent, serait exposée à un sérieux risque de censure constitutionnelle ou conventionnelle, ce qui interdit de la recommander », ont conclu les magistrats.

    Or, une censure de loi « sonnerait comme une défaite de la République. Il est donc essentiel de bien peser les enjeux et les risques d’une telle interdiction », avait prévenu la mission d’information parlementaire sur le voile intégral, dans son rapport publié en janvier dernier. Les élections régionales et la déroute de l’UMP auront ouvert la voie aux plus téméraires…. Au risque de faire la publicité d’une pratique certes en progression, mais qui demeure marginale.

    1 900 femmes porteraient le voile intégral sur le territoire national, selon les estimations du ministère de l’Intérieur (dont 270 établies dans les collectivités d’outre-mer). La moitié seraient âgées de moins de trente ans, et l’immense majorité (90 %) auraient moins de quarante ans. Les deux tiers seraient des Françaises, parmi lesquelles la moitié appartiendraient aux deuxième et troisième générations issues de l’immigration. Fait remarquable, un quart des femmes intégralement voilées seraient des converties.

    « Il s’agit d’une pratique anté-islamique importée ne présentant pas le caractère d’une prescription religieuse », a rapporté Éric Raoult au nom de la mission parlementaire. « Elle participe de l’affirmation radicale de personnalités en quête d’identité dans l’espace social mais aussi de l’action de mouvements intégristes extrémistes ; elle représente un défi pour de nombreux pays. »

    Et de citer Mme Nilüfer Göle, directrice d’études à l’École des hautes études en sciences sociales, faisant le constat que « les filles portant le foulard en France sont plutôt en rupture avec la manière traditionnelle dont le portait leur mère ou leur grand-mère ». La même analyse serait valable au sujet des femmes portant volontairement le niqab, auxquelles la mission a attribué deux motivations : « en premier lieu, la recherche de pureté dans la pratique d’un culte plus austère ; en second lieu, la volonté de prendre ses distances avec une société jugée pervertie ».

    Prenant acte de la situation, les parlementaires ont proposé, entre autres, de « renforcer la formation civique délivrée dans le cadre du contrat d’accueil et d’intégration ». Si la l’interdiction devait être votée – puis appliquée… –, des stages de “citoyenneté” seraient peut-être imposés aux contrevenants.

    Sans doute y inculquerait-on le principe de laïcité, censé permettre, selon nos députés schizophrènes, « l’intégration à la communauté nationale de ceux qui rejoignent la France pour y travailler et y vivre », mais « n’interférant pas dans leur culture et leur religion ». « Lutter contre le port du voile intégral c’est […] faire œuvre de libération », a encore proclamé le rapport parlementaire. « C’est notre vivre ensemble fondé sur l’esprit des Lumières qui est bafoué », a confirmé André Gérin.

    Les pouvoirs publics se fourvoient dans l’idéologie contractualiste. Laquelle exclut fort logiquement la perspective d’assimilation – un processus dont l’aboutissement tient moins aux volontés individuelles qu’à l’enracinement progressif des générations.

    Renouant avec ses grands principes, la République se remémorera-t-elle également ses velléités totalitaires ? Selon les révélations du Figaro (04/05/2010), le ministre Éric Besson serait « disposé » à exposer à la déchéance de leur nationalité des Français coupables d’« atteintes caractérisées aux valeurs fondamentales de notre République ».

    Sauf que le brave Besson a l’air d’oublié que depuis les dragonnades et la Terreur…On ne peut imposer l’amour de la République aux Français. La seule loyauté requise et légitime c’est celle envers le pays. C’est pourquoi, par ex, on condamne les militaires qui désertent parce qu’ils ont trahi la France. On ne ferait pas la même chose concernant la République, les soldats comme du reste les Français pouvant fort bien servir la France sans être au service d’un régime politique particulier (les royalistes ont ainsi défendu le pays en 14-18 sans se rallier pour autant à la République)

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