Le petit virus, grand pédagogue ? (III) – La mort de l’exception française ?

La plus grande des illusions françaises tient dans un paradoxe : alors que l’identité française est submergée par la mondialisation des produits et des comportements, mondialisation tronquée d’ailleurs, car si les produits sont souvent chinois, les comportements sont toujours américains, avec une invasion du “globish” dans notre langue, comme si une idée était plus claire et plus forte “in English”, les discours officiels, eux, continuent à souligner l’exemplarité française, l’exception française que le monde entier nous envie, éperdu d’admiration pour le pays des droits de l’homme. Ainsi, en était-il de notre système de santé ! Le Covid-19 nous a réveillés au beau milieu de ce vieux rêve. Certes, l’accès aux soins est regardé avec beaucoup d’intérêt par les étrangers qui viennent se faire soigner gratuitement grâce à l’AME ( Aide Médicale d’Etat). Celui-ci constitue une véritable “préférence étrangère” puisque un immigré clandestin, sans titre de séjour, est soigné dans des conditions dont un Français ne bénéficie pas : couverture totale sans avoir contribué à la dépense par ses impôts ou ses cotisations ! En revanche, on se rend compte que notre système de santé est loin d’être le meilleur du monde.  Il jouit toujours de son héritage et de ses traditions, ses praticiens déploient en ce moment même des trésors de dévouement, de courage et de compétence, mais les faits sont là : la France, loin de faire mieux que les autres, se situe plutôt parmi les pays les moins performants, avec des chiffres qui suivent ceux de l’Italie d’une dizaine de jours, alors que l’Allemagne, qui copie la stratégie de la Corée du Sud, obtient de bien meilleurs résultats.

Cette déconvenue tend à générer une grande nostalgie socialiste de la dépense publique en faisant porter la responsabilité du désastre sur les économies qui auraient affaibli la protection sanitaire des Français. Il faudrait donc, là-aussi, plus d’Etat ! C’est un contre-sens ! Le problème de l’Etat en France, c’est celui de l’obésité : la graisse inutile, nuisible, étouffe les muscles et le coeur. L’accumulation des technostructures, le poids de la bureaucratie augmentent la dépense improductive tandis que les outils efficaces, les muscles, s’affaissent et que le coeur, le courage qui doit animer les acteurs, les soignants, les policiers, les soldats, risque de s’anémier. La décentralisation a multiplié les strates administratives redondantes qui se sont empressées de recruter des fonctionnaires superflus. L’Etat central a collectionné les fromages destinés à accueillir les copains du pouvoir, brillants énarques parisiens en mal de fonctions superbement rémunérées, tandis qu’il supprimait des emplois de proximité beaucoup plus utiles, dans les hôpitaux, les écoles ou les commissariats. La dépense publique, et les impôts qui ne la financent qu’en partie, devraient être diminués, mais en les orientant vers ce qui est opérationnel. L’addition des organes de décision et de contrôle n’a pas permis de prévoir l’arrivée de la pandémie en France, ni de préparer le pays à la recevoir. Elle entraîne parfois au contraire des blocages et des contre-ordres qui ralentissent l’action et ruinent son efficacité. C’est l’appareil nécessaire aux tests commandé par le médipôle de Tours, et réquisitionné par la Préfecture, c’est le bus transportant huit malades de Reims à Tours obligé de rebrousser chemin sur injonction de l’ARS, parce que le PC de crise de Paris, à la DGS, n’a pas donné son feu vert. Alors qu’on perçoit beaucoup d’improvisations dynamiques à la base, un carrossier qui fournit des masques à des médecins, des clients qui leur en apportent, des entreprises qui en fabriquent, en commandent ou offrent les leurs, pris sur les réserves, au sommet là où l’organisation devrait régner, c’est bricolage dans la gestion et cafouillage dans la communication. Les mensonges d’Etat sur l’utilité des masques ou l’étendue des tests pour cacher le retard et la pénurie, le “cinéma”, comme disent les Suisses, du transfert des malades par avion pour dissimuler l’insuffisance des lits et des respirateurs, l’incroyable polémique sur l’hydroxychloroquine, sont autant de variations sur le thème du “mal français”, celui d’un Etat centralisateur, imprévoyant et néanmoins dirigiste. On sait très bien que l’application des 35 heures en dehors des entreprises de production capables d’accroître leur productivité, dans le service public notamment, a puissamment surchargé et désorganisé l’hôpital.

Alors, en dehors des conférences technocratiques quotidiennes de M. Salomon qui nous inondent de chiffres pour créer l’illusion de la maîtrise, c’est depuis trois semaines gestion du désarroi et panique à bord. Lors de la première, le 24 Janvier, Mme Buzyn déclarait : ” Pour la France, les analyses de risques d’importation sont modélisées régulièrement par des équipes de recherche. Le risque d’importation de cas depuis Wuhan est modéré, il est maintenant pratiquement nul parce que la ville est isolée.” Depuis elles servent à établir les courbes montantes des malades et des décès.  L’Etat-stratège qui avait annoncé que la guerre n’aurait pas lieu en est à faire le bilan quotidien de ses victimes. Or, celui-ci révèle, lorsqu’on le compare à celui de la Corée du Sud ou de l’Allemagne, l’inanité d’une stratégie absurde qui a consisté à isoler les gens chez eux plutôt que de les protéger les uns des autres par des masques, parce qu’il n’y avait pas de masques et qu’on ne voulait pas le dire. Cette politique de Gribouille aura deux conséquences désastreuses : la mise en sommeil de notre économie et celle de nos libertés. L’Etat-stratège est en déconfiture et l’Etat de droit en sommeil.

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5 commentaires

  1. Je pense que c’est précisément parce qu’on n’a plus d’état-stratège, celui qui a quand même fait notre grandeur, qu’on en est arrivé là: notre état macronien est un état purement régulateur qui ne fait que gérer les crises à la petite semaine. Celle que nous vivons aujourd’hui révèle les failles et les manquements criants de cet état-arbitre qui n’a rien pu anticiper faute de vision à long terme!

  2. “l’accès aux soins est regardé avec beaucoup d’intérêt par les étrangers qui viennent se faire soigner gratuitement grâce à l’AME ( Aide Médicale d’Etat). Celui-ci constitue une véritable “préférence étrangère” puisque un immigré clandestin, sans titre de séjour, est soigné dans des conditions dont un Français ne bénéficie pas : couverture totale sans avoir contribué à la dépense par ses impôts ou ses cotisations ! ”
    “Le problème de l’Etat en France, c’est celui de l’obésité : la graisse inutile, nuisible, étouffe les muscles et le coeur. L’accumulation des technostructures, le poids de la bureaucratie augmentent la dépense improductive tandis que les outils efficaces, les muscles, s’affaissent et que le coeur, le courage qui doit animer les acteurs, les soignants, les policiers, les soldats, risque de s’anémier. La décentralisation a multiplié les strates administratives redondantes qui se sont empressées de recruter des fonctionnaires superflus. L’Etat central a collectionné les fromages destinés à accueillir les copains du pouvoir, brillants énarques parisiens en mal de fonctions superbement rémunérées, tandis qu’il supprimait des emplois de proximité beaucoup plus utiles, dans les hôpitaux, les écoles ou les commissariats. La dépense publique, et les impôts qui ne la financent qu’en partie, devraient être diminués, mais en les orientant vers ce qui est opérationnel. ”
    Voilà, encore une fois vous avez dit l’essentiel; Mais comment faire pour corriger ces tares majeures de notre Pays ?

    1. Un gouvernement d’exception serait nécessaire, mais je ne crois pas que la société française soit encore en état de l’accepter. Les réticences et les oppositions viendront des cercles politiques et syndicaux soutenus par les médias. Le sursaut a besoin d’un consensus national. Les catastrophes nous y préparent, mais elles n’ont pas encore atteint le niveau nécessaire. Sur quelle base politique et sociale reposerait ce gouvernement ? Voilà la question essentielle. Les corps sociaux qui sont encore pénétrés par l’idéal du Bien Commun sont-ils encore suffisamment puissants pour appuyer la résilience ?

  3. Le chef des armées n’est plus qu’un chef désarmé, il a brûlé ses vaisseaux en l’espace de 3 ans pour des lois btouillonnes inadaptées voire inutiles.

    Quand on déclare être en guerre,on délègue le pouvoir aux militaires et pas à un pseudo conseil scientifique !
    Un général ne laisserait pas mourir ses troupes alors qu’il a connaissance d’un médicament , il concentrerait ses forces contre l’ennemi et en cas grave de défaite sacrifierait sans doute la mort sans l’âme quelques soldats dont certains sont déjà blessés voire incapbles de se replier.
    Pour avoir choisi au départ une stratégie d’immunisation collective en tablant sur un faible taux de mortalité à peine supérieur à une grippe saisonnière, les dirigeants mènent de front une guerre de communication en instrumentalisant les dégâts collatéraux, imposant un confinement qui ne fait que repousser le pb, une guerre médicale des égos Levy vs Raoult, et une guerre de confiance engluée par des normes administratives et par le manque de matériels qui l’empêche de prendre les mesures d’urgence pour sortir rapidement du confinement !
    Trump a su changer d’avis, masques pour tout le monde et tests pour lutter contre le virus en ne confinant et soignant que les sujets à risque.
    La pénurie importante de masques implique d’en faire fabriquer par chacun des citoyens pour qu’ils puissent sortir du confinement et reprendre leur activité dès que le pic dépassé assure les hôpitaux de pouvoir faire face aux nouveaux cas qui pourraient émerger après une campagne préventive simultanée de prescription de chloroquine dont les effets secondaires potentiels peuvent nécessiter quelques hospitalisations dans des unités (cardiaques) sans réanimation.
    La fabrication de masse et urgente de plaquenil pourrait sauver des vies et notre économie !

  4. On n’a peut-être pas atteint le pic de l’épidémie et déjà l’Assemblée nationale vient de créer une mission d’information présidée par Ferrand : « Impact, gestion et conséquences dans toutes ses dimensions de l’épidémie de Coronavirus-Covid 19 ». Sans préjuger de la teneur de ses travaux, on peut aisément subodorer que, dans ce cadre, l’Exécutif n’y sera pas trop malmené quant à ses lourdes responsabilités dans cet abominable fiasco. La commission des lois du Sénat vient de constituer, de son côté, une « mission de suivi » visant à analyser les textes de la loi dite « d’urgence sanitaire ». On peut imaginer que d’autres commissions, comités et missions verront le jour après la crise sanitaire pour nous faire croire que « les choses vont changer » comme ils disent. Cela aura pour effet de mettre une fois de plus le peuple de côté pour éviter questions gênantes, témoignages accablants et preuves irréfutables. Ceci étant, le site du Sénat dispose d’un espace permettant de déposer une pétition. Ces pétitions permettent de pouvoir saisir le Sénat d’une demande d’inscription à l’ordre d’un texte législatif. Les pétitions ayant recueilli au moins 100 000 signatures dans un délai de 6 mois sont transmises à la Conférence des Présidents. Une telle pétition pourrait consister, en l’occurrence, en une proposition de résolution visant à demander la création d’une commission d’enquête sur cette crise du COVID 19 pour évaluer les dysfonctionnements de l’appareil d’État. Comme dans l’affaire Benalla, une telle commission aurait un périmètre propre à éviter d’éventuelles interférences avec des procédures judiciaires nombreuses, on s’en doute. On peut aussi imaginer que les sénateurs prendront cette initiative eux-mêmes mais le fait que le peuple lui-même le demande pourrait renforcer la légitimité des sénateurs dans leur mission et avoir un impact fort. Réunir 100.000 signatures n’est pas une mince affaire mais les réseaux patriotiques peuvent y parvenir, j’en suis certain. Peut-être une idée à creuser…ou une fausse bonne idée…Qu’en pensez-vous ?

    https://petitions.senat.fr/

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