Tout ça pour ça ?

Le profil étonnant de Macron a fait de la politique française une étude de psychologie appliquée. Une fois encore, le président élu par les Français a répondu aux attentes de ceux-ci par une performance oratoire. Comme lors de ses interventions pendant le grand débat, il a montré ses qualités de marathonien du discours, sans penser qu’une heure pouvait lasser les auditeurs à qui il n’apprenait rien de vraiment nouveau. Cherchait-il à les hypnotiser ? On peut hélas craindre qu’il ne s’hypnotise lui-même au charme narcissique de sa voix. Le président est toujours au théâtre à lancer des formules aussi creuses que belles, pompeuses, en un mot : l’art d’être français, enfants des lumières, etc… Dénué de la moindre expérience sur le terrain qui est le chemin inévitable des vrais politiques, mais incroyablement arc-bouté sur ses préjugés, il promet de changer de style, d’être moins “dur”, c’est-à-dire méprisant envers les Français, mais il l’est toujours autant car sous l’emballage qu’il prétend nouveau, le cadeau empoisonné reste le même : le chef a toujours raison…. et les gilets jaunes tort !

Le premier axe de ses annonces écarte le Référendum d’Initiative Citoyenne, la demande la plus massive des gilets jaunes qu’il réduit faussement à la possibilité de la révocation des élus  alors qu’en Suisse où ce système existe, il ne comprend pas ce dispositif. Mais il propose de faciliter le Référendum d’Initiative Partagée introduit par la réforme constitutionnelle de 2008 : grossière manoeuvre puisque ce dernier ne débouche que sur un débat au Parlement. Vous voulez qu’on en parle, diront les députés ? Eh, bien, on en a parlé ! En revanche, c’est une mesure démagogique que d’éloigner les parlementaires de leurs électeurs en en diminuant le nombre et en en faisant élire à la proportionnelle. Plus d’électeurs par député, donc plus éloignés d’un représentant qui sera hors-sol par la distance et le nombre, par le vote quasi-anonyme de la proportionnelle, sans compter les “députés de l’étranger”. Sous couvert de flatter l’antiparlementarisme, on retire du pouvoir au peuple ! Et on crée des conseils dont les membres seront tirés au sort… Dans le fond, cela résume le macronisme : renforcer le pouvoir de l’oligarchie dont Macron est le prototype caricatural, mais en prétendant le contraire. Passez muscade. Il est champion du bonneteau !

La fiscalité était la seconde préoccupation des gilets jaunes et de la très large majorité de Français qui les soutenaient au début de la fronde. Celui qui était le conseiller économique de Hollande lors du choc fiscal néfaste dont la France subit encore les conséquences n’a toujours pas compris que l’économie reposait davantage sur la confiance que sur la comptabilité. Seul un choc fiscal positif peut rétablir la confiance à condition de ne plus rien changer assez longtemps pour que les acteurs économiques vivent dans la sécurité à longue distance. Pinay fut plus efficace que les énarques qui lui ont succédé. Mais les inspecteurs des finances, avant d’aller faire chavirer l’entreprise dans laquelle ils vont pantoufler, se prennent pour des ingénieurs maniant sans cesse les taux et les assiettes, les seuils et les plafonds. Macron n’a pas dérogé à la règle : derrière l’idée sympathique mais floue d’une baisse des impôts pour les classes moyennes, il y a des mesures étalées dans le temps et limitées à des catégories, le maintien de la suppression de l’ISF, mais la suppression de niches non identifiées : bref, un tableau vague, composite et mouvant qui est le contraire de la sécurité.

Pour le reste, le Président a négligé les problèmes prioritaires au profit des marottes qu’il affectionne parce qu’elles ont l’intérêt de détourner l’attention des sujets essentiels. Ainsi , le climat est toujours, pour lui,  la question la plus urgente, alors que la France est l’un des pays les moins à même de peser sur le réchauffement climatique, en raison de sa taille et de son énergie nucléaire. L’immigration est bien plus cruciale. Il en est resté sur ce point aux bonnes intentions. Enfin, il a parlé de la famille, mais en s’attachant au problème social des familles monoparentales quand la France a le plus urgent besoin de la restauration d’une politique familiale digne de ce nom encourageant la natalité des nationaux. En somme, Macron n’a pas changé : il est toujours l’énarque-banquier mondialiste, et en même temps le progressiste sociétal, c’est-à-dire le pire danger pour notre pays.

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7 commentaires

  1. La prospérité (donc les emplois et le pouvoir d’achat que réclament le GJ) suppose un fort degré de libertés économiques. On aurait aimé que Macron rappelle cette évidence facilement vérifiable, et qu’il annonce une politique allant dans ce sens.
    Mais l’objectif de Macron le “progressiste” n’est sans doute pas la prospérité.

  2. Le RIC, c’est déjà une récupération, comme l’extrême gauche maintenant.

    Il y a eu une cohorte de braves gars venus manifester contre une taxe sur le carburant. Comme on leur demandait ce qu’ils voulaient d’autre, un cynique de passage, issu peut-être des rangs du RPF, leur a soufflé le RIC (comme Romain Gary dit qu’il a soufflé un slogan de grande postérité aux 68ards, dans Chien blanc).

    Mais le RIC, tout le monde s’en tape, sauf les militants libéraux qui espèrent pouvoir faire passer leurs âneries (et je suis poli) de cette façon, avec l’aide de médias propriétés de milliardaires voyant les choses du même oeil.

    De plus, ne faites pas semblant de pleurer : Macron a abaissé le seuil du referendum introduit par Sarkozy (et Dieu sait si ces deux politiciens sont, de l’avis général, soucieux du bien commun et de l’intérêt général). Donc vous l’aurez, votre RIC à la noix, et les mauvais choix qui vont avec.

    1. Chien blanc a été écrit en 1970, ce qui montre que Gary avait vraiment le coup d’oeil. Chapeau bas.

      Sans prétendre à la même prescience, je suis toutefois convaincu que tous ceux qui disent vouloir le RIC sans être des cyniques libéraux auront l’occasion de s’en mordre les doigts.

    2. Le référendum d’initiative partagée n’a rien à voir avec le RIC. Il n’engage qu’à un débat à l’Assemblée : le peuple voulait qu’on en parle, on en a parlé, et passez muscade.

  3. Macron a également annoncé la suppression de l’ENA : Cette lumineuse idée n’est pas sorti de nulle part et encore moins de son petit cerveau malade. L’an dernier le Sénat avait créé une commission d’enquête sur le sujet de la haute fonction publique et, fait rarissime, le rapporteur, M. COLLOMBAT avait été autorisé à publier sa position personnelle :
    http://www.senat.fr/rap/r18-016-2/r18-016-21.pdf
    Le rapport était sévère mais ne proposait pas la suppression de la fabrique d’énarques. Au contraire, il s’agissait de remettre de l’ordre dans le vaste foutoir de la haute fonction publique française. Macron a pris l’exact contre-pied de ce travail parlementaire et veut créer une sorte de corps de mercenaires venant de tous horizons, payés sous contrat, sans scrupules et entièrement aux ordres : une petite armée de Benallas. Il s’agit de pouvoir choisir à son gré qui on veut comme préfet, consul, ambassadeur ou directeur d’administration centrale. La déconvenue de l’annulation de la nomination de Philippe Besson comme consul de France à Los Angeles a dû aussi peser dans la balance.

  4. Je m’en suis rendu compte durant le bref moment où j’ai aperçu et saisi au vol Macron serrant la main des joueurs de la finale de la Coupe de France, hier soir sur la pelouse du stade de France, avant le début du match : rien à faire, je suis allergique à son physique, ses postures, sa voix, surtout, avec ce débit insupportable…
    Même en y mettant la meilleure volonté du monde, je suis incapable de voir en Macron autre chose qu’une marionnette qui s’est appuyé sur des réseaux puissants pour devenir président de la république, lorsque l’annonce de sa candidature à la présidence de la république avait même suscité chez moi la plus parfaite incrédulité , pensant même à une “fake news” au départ, lui un parfait inconnu, sans parti politique, sans le plus petit mandat politique rempli, sans le moindre gramme d’expérience politique, sans aucune connaissance de la respiration d’un pays profond, hors des grandes écoles parisiennes et des cabinets d’affaires…

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